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De quelques réflexions pratiques sur les clauses de séquestre

Le droit positif s’intéresse rarement au séquestre conventionnel et les décisions de la Cour de cassation sur ce sujet ne sont pas légions.

Toutefois, la Première Chambre Civile de la Cour de cassation ( décision du 20 janvier 2021, n° 19-18.567) nous donne l’occasion de réfléchir à nos clauses de séquestre présentes dans les actes.

Nous connaissons tous, la clause suivant laquelle, de convention entre les parties, une certaine somme est séquestrée entre les mains du notaire, qui en accepte la mission.

Pour autant, seul l’accord des parties ou une décision judiciaire exécutoire permettra de « libérer le séquestre ».

Séquestrée, la somme restera indisponible entre ses mains : les fonds sont sécurisés.

Pour autant, cette somme appartient toujours au dépositaire et ne pourra être appréhendée par d’autres créanciers que les siens.

Les promesses unilatérales, sont le terrain de prédilection de ce type de clause : l’indemnité d’immobilisation versée par le bénéficiaire est séquestrée par le notaire. Si le bénéficiaire de la promesse fait le choix de ne pas lever l’option durant le délai imparti, le notaire devra, en théorie, reverser cette somme au promettant.

Les promesses synallagmatiques s’en font aussi l’écho lorsqu’elles prévoient une clause pénale constituée de la totalité, ou non, du dépôt de garantie séquestré de la même manière. Si l’acquéreur ne vient pas réitérer l’acte alors même que les conditions suspensives sont levées, cette somme restera acquise au vendeur.

Mais alors, au cas où le bénéficiaire ou l’acquéreur ne donne pas l’autorisation au notaire de libérer la somme entre les mains du promettant ou du vendeur, de deux choses l’une : soit celui-ci saisi les tribunaux pour l’obtenir, soit il y renonce sachant bien qu’un contentieux sur la promesse de vente l’empêchera de revendre le bien, dans un délai raisonnable, à un autre acquéreur.

Au final, et dans ce cas, le promettant ne sera pas indemnisé du prix de l’exclusivité consenti sur son bien, ni le vendeur du préjudice subi par la non réitération de l’acte. Mais, tous deux seront libres de le vendre à nouveau.

Nous le savons : en cas de désaccord des parties et en l’absence de procédure contentieuse, une somme séquestrée pourrait bien devenir éternellement la propriété de la Caisse des dépôts et des consignations !

Nos clauses de séquestre ne protègent pas suffisamment les parties à l’acte du fait de leur mise en oeuvre délicate

C’est alors, à la pratique notariale de réfléchir peut être à d’autres rédactions possibles.

Il pourrait être envisagé que dès la signature de l’avant contrat, le bénéficiaire ou l’acquéreur autorise le notaire à libérer la somme séquestrée entre les mains du vendeur ou du promettant en cas d’inexécution des engagements contractuels ou d’absence de levée d’option.

Un telle clause suppose une rédaction claire et précise : les parties donnent en amont leur accord pour libérer les sommes mais, dans des cas précis et au profit de personnes intéressées.

Il est certain qu’une telle clause serait plus protectrice des intérêts du vendeur ou du promettant et leur assurerait le versement de la somme séquestrée.

Mais ce n’est peut-être qu’une apparence…

C’est, en effet, ainsi que dans la décision du 20 janvier dernier, la clause de séquestre était rédigée.

Un séquestre conventionnel avait été constitué entre les mains du notaire. La somme séquestrée était destinée à régler des travaux de dépollution effectués par un tiers.

L’acte précisait que les fonds seraient libérés par le séquestre sur présentation de la facture émise par le tiers, par la partie la plus diligente.

Il y avait donc un accord des parties originaire pour libérer, à première demande d’une des parties recevant la facture du tiers, la somme séquestrée entre les mains de ce dernier.

Malheureusement, le contentieux n’a pas été évité car le séquestre ne fut pas libérer ainsi ; les parties reprenant possession de la somme.

La haute juridiction nous le rappelle alors : le séquestre est un contrat et il est impossible de le remettre en cause, lorsque les obligations sont contenues dans l’acte authentique initial.

Il est donc une certitude : le séquestre conventionnel suppose d’investir le séquestre d’une mission bien précise décrites dans la convention de séquestre.

Cependant, il est permis de douter que la libération des fonds séquestrés, ordonnée et prévue en amont, se passe bien et sans aucune contestation.

On le voit, le séquestre ne se suffit toujours pas à lui même pour satisfaire les intérêts en présence.

Il est alors nécessaire de l’accompagner d’un outil complémentaire pour lui donner sa pleine efficacité : user du nantissement de créance pour nantir au profit du vendeur ou du promettant l’indemnité d’immobilisation ou le montant de la clause pénale ainsi séquestrée est une voie qu’il est possible de suivre…

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