Quel avenir pour les lots transitoires, non conformes à l’article 1er (I) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, après le 23 novembre 2021 ?

Le lot transitoire est érigé, en droit positif, au rang de lot de copropriété.

Ainsi, le droit de construire constitue à lui seul la partie privative, auquel une quote-part de parties communes doit être attachée.

Ce lot existe bien que la construction et/ou l’aménagement envisagé (s) ne soit (en) pas réalisé (s).

Les difficultés du lot transitoire viennent de la non-réalisation des ouvrages avec, toutefois, l’obligation d’en payer les charges.

Le droit prétorien, en son temps, reconnait l’existence du lot transitoire : c’est un « lot privatif composé pour sa partie privative du droit exclusif d’utiliser le sol pour édifier une construction et d’une quote-part de parties communes » (voir par exemple, Cass. civ. 3, 3 novembre 2016, n° 15-14.895 et 15-15.113). La partie privative est constituée du droit de construire un ou plusieurs bâtiments (Cass. civ. 3, 18 septembre 2013, n° 12-16.357).

La « Loi ELAN » du 23 novembre 2018 a créé à l’article 1er (I) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 une définition légale du lot transitoire : « il est alors formé d’une partie privative constituée d’un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu’il permet de réaliser et d’une quote-part de parties communes correspondante“.

Mais, « la création et la consistance du lot transitoire sont stipulées dans le règlement de copropriété. »

De fait, une dichotomie s’installe entre les lots transitoires désignés conformément aux exigences de la loi ELAN et, ceux, qui n’ont pas été mis en conformité avec le nouveau dispositif.

Il n’est donc plus possible de se contenter de définir vaguement le lot transitoire dans le règlement de copropriété, voire dans l’état descriptif de division.

Dans la décision du 17 juin dernier, le lot transitoire était mentionné uniquement dans l’état descriptif de division, sans aucune précision sur la nature des édifications prévues. Une mise en conformité du règlement de copropriété était donc nécessaire, pour les décrire précisément puis, insérer cette description dans l’état descriptif de division.

Au vu de ces insuffisances, les juges du fond estiment ce lot inexistant car n’ayant fait l’objet d’aucune consistance précise dans le règlement et l’état descriptif. Il ne peut donc être qualifié de lot transitoire au sens de l’article 1er (I) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

Une telle décision est censurée par les juges de droit.

En effet, en l’état actuel des textes, le délai pour mettre les règlements de copropriété en conformité expirera le 23 novembre 2021.

En l’espèce, ce délai n’était pas encore arrivé à terme.

Il n’est donc pas envisageable de constater que le droit de construire ainsi prévu n’est pas un lot transitoire au sens de l’article 1 er (I) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 .

L’obligation de définir le droit à construire ne peut être sanctionné tant que le délai de mise en conformité des règlements de copropriété n’a pas expiré.

En exigeant une définition plus précise du droit à construire dans le règlement de copropriété pour reconnaitre l’existence d’un lot transitoire, la Cour d’appel a fait fi du délai ainsi imparti.

En effet, l’article 206 de la loi du 23 novembre 2018 a pour but de laisser aux syndicats de copropriétaires un délai de trois ans pour définir précisément le lot transitoire dans le règlement de copropriété.

Mais alors et à l’inverse, que va t-il se passer après le 23 novembre 2021 lorsque le syndicat des copropriétaires n’aura pas procédé à cette mise en conformité ?

De deux choses l’une :

-soit, le lot transitoire n’est pas pris en compte dans le règlement de copropriété : il ne peut avoir une existence juridique par le biais de le mise en conformité.

-soit, la consistance du lot transitoire n’est pas précisée dans le règlement, comme l’impose l’article 1er (I) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 et, ce lot bien qu’admis en son principe, ne pourra donner lieu à un droit à construire. En ce cas, une telle clause pourra être réputée non écrite (voir en ce sens, la préconisation n° 10 du 20 octobre 2010 du GRECCO).

En réalité l’absence de mise en conformité conduit donc inexorablement à l’inexistence du lot transitoire soit dans son principe même, soit lors de sa mise en oeuvre.

En conséquence, pour bénéficier d’un lot transitoire, l’assemblée générale de la copropriété doit avoir approuvé le modificatif du règlement de copropriété avant la date butoir fixée par le législateur qui n’impose pas, pour l’instant, dans ce même délai, la publication dudit modificatif.

La vigilance est de mise pour procéder dans les délais légaux à la mise en conformité des lots transitoires sous peine de voir ces derniers devenirs inexistants.


Gageons néanmoins que l’article 24 de l’actuel projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique sera promulgué avant le 21 novembre 2021.

En effet, il prolonge de trois ans la durée accordée aux syndicats de copropriété pour procéder à la mise à jour de leurs règlements; portant ainsi le délai de mise en conformité au 23 novembre 2024.